25
Nov

[CRITIQUE]Göran Hugo Olsson – « Concerning Violence »

[L’intégralité de l’article ici : http://www.culturopoing.com/cinema/sorties-salles-cinema/goran-hugo-olsson-concerning-violence/20141125 ]

La société colonisée n‘est pas seulement décrite comme une société sans valeurs. L’indigène est déclaré imperméable à l‘éthique. Absence de valeurs, mais aussi négation des valeurs. Les valeurs, en effet, sont irréversiblement empoisonnées et infectées dès lors qu‘on les met en contact avec le peuple colonisé. Les coutumes du colonisé, ses traditions, ses mythes, surtout ses mythes, sont la marque même de cette indigence.

Franz Fanon, Les damnés de la terre

Que la forme ne trompe pas : Concerning Violence, du suédois Göran Hugo Olsson n’est pas vraiment un documentaire. Du moins pas au sens informatif et télévisuel du terme, talking-heads et voix off inclus.Basé sur des images d’archives issues pour la plupart de fonds suédois, il s’aborde comme un essai autour d’un texte de Franz Fanon, écrivain français de Martinique travaillé par la question du racisme et du colonialisme, et dont le texte Les damnés de la terre (1961), source de ce film, fut préfacé à l’époque par Sartre.

concerningViolence

Film nécessaire sur nos péchés, Concerning Violence évoque une période toujours trouble et silencieuse du monde des dominants : celle de la fin du colonialisme, de la terre exsangue laissée à des peuples révoltés dont on continue aujourd’hui l’exploitation. Le silence des discours racistes, des hommes réduits à l’état d’objet. Film déflagration, intellectuel et pourtant tendu, la violence du titre est autant celle des oppresseurs et des oppressés en réponse, que celle du film tout entier, puissant objet de rage qui ne desserre jamais son étreinte sur le spectateur. Et si son titre complet est « 9 scènes de l’autodéfense anti-impérialiste », ce n’est pas pour rien : ce sont des tranches dans le vif plutôt qu’une somme auquel il tend.

[…]

Concerning Violence est un film-tract, dont les résonances sourdes parviennent comme autant de vagues heurter la situation mondialisée actuelle, rappelant les grandes heures du film politique ou du groupe Dziga Vertov, à une différence près. Car si le texte de Fanon est sa clef de voûte, l’ossature de l’analyse, il est aussi son fardeau : si la voix subjugue, force est de constater qu’à la différence d’autres films de montage comme La société du spectacle (que le réalisateur cite explicitement comme inspiration de son film dans le dossier de presse) ou même La Rage de Pasolini, Concerning Violence pêche par son absence assez forte de réelle dialectique entre le son et les images. Aveuglé par sa colère et étouffé par le texte de Fanon, il les réduit à une pure idée d’illustration, validation du son. C’est peut-être dans la matière de l’image qu’il aurait trouvé une potentielle porte de sortie à la répétition de son système, en creusant encore la dialectique de la violence.

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