09
Fév

[CRITIQUE]Alice Rohrwacher – « Les merveilles »

[L’intégralité de l’article par ici : http://www.culturopoing.com/cinema/sorties-salles-cinema/alice-rohrwacher-les-merveilles/20150209

Flashback de 2014 : Cannes, fric et cocotiers. Classique et ridicule scandale du Palais, Les Merveilles, d’Alice Rohrwacher, prétendument formaté pour plaire à la présidente et froidement reçu par la presse cannoise, est reparti couronné du Grand Prix. Alors, miracle sensoriel ou esbrouffe auteuriste ?

 © Ad Vitam

« On devrait cacher un secret sous le carrelage, comme ca dans quelques années les gens le trouveront. »

[…]

Et le tour de force incroyable du film, c’est de ne jamais céder, quelle que soit la forme qu’il aborde, à une sorte d’ostentation. Pire : de sensiblerie.

C’est qu’Alice Rohrwacher se méfie de l’effet, du « truc ». Laissons cela à la télé : face à la simplicité évidente de chaque instant familial, l’outrance des costumes historiques ridicules et des filtres de couleurs du « Pays des merveilles » expose sa vulgarité. On y grime les paysans pour faire authentique, on célèbre le « vrai produit », on rit habillés en Etrusques, puis on pleure sur le bateau qui rentre.

Jamais de plans de coupes élégiaques, de gros plans outranciers : si « poésie » il y a, elle est toujours corrélée au plan, mais jamais son unique sujet. Face au trait facile, le film, lui, prend plutôt lui le parti de la patience. Par un travail subtil de mise en scène presque documentaire, où l’esthétique s’effaçe derrière le geste, le personnage, l’enregistrement d’une forme d’hyperprésent touchant,  donnant la sensation troublante d’un film qui se cherche autant que son héroïne. Journal de bord d’une adolescence solaire en autant de mues que de scènes, dans un geste hésitant entre la naturalité et une forme de poésie païenne et arte povera. Une fiction liquide et douce comme le miel, s’autorisant de brusques écarts quasi-fantastiques à la grammaire filmique, comme ce faux raccord d’ombres projetés dans la caverne où se réfugie les deux adolescents, puis retombant dans l’enregistrement quotidien de tomates à peler. Si coming-of-age il y a, il est tout à la fois autant celui de Gelsomina que de la réalisatrice et son geste, et du spectateur les regardant toutes deux se dévoiler , tous trois avançant tous ensemble de concert à tâtons, dans une quête bancale vers l’inconnu et le sensible.

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